22 mars 2006

Terra quasiincognita

A Salaam Aleykum

Je suis a Gwadar,au fin fond du Baloutchistan
.Un petit port de peche qui sens fort et aux policiers sur-pourris.

On m avait conseille de skiper Quetta et de monter direct a Lahore,car la capitale du Baloutchistan pakistanais,avec son melange de population pashtoun,baloutche,afghane et pendjabie,et les tensions ethniques latentes,est une entree un peu brutale dans le pays... C est vrai que c est une ville un peu violente(j ai assiste a une fusillade...pas grand-chose,un reglement de compte),mais pour moi(avec ma bonne etoile), ce fut surtout l occasion de me preparer a voyager plus avant dans le Pakistan.
Une fois achetee une shalwar-kamiz(l habit traditionnel paki,pantalon bouffant et chemise jusqu aux genoux,que tout le monde,sans exception,porte)avec quoi je suis plus discret(tout en montrant du resect envers leur culture),tente d adapter mon estomac a la cuisine locale,epicee et HYPER grasse,et m etre familiarise avec la rouppie,je suis parti sur des chemins de traverse vers Karachi.Je compte arriver la-bas dans quelques jours,apres avoir vu un ou deux autres villages cotiers de mon choix.
La progression est assez lente car j ai traverse le Baloutchistan central et austral,une region qui vit encore "avec des moyens du 19 e siecle"comme se plaignent les locaux.
C est assez vrai,il n y a pas de routes,juste des pistes defoncees,"enjolivees" de quelques metres de goudron par-ci par-la,mais les tentatives de routes ont ete emportees par les pluies,tres rares mais extremement puissantes.
De Quetta a Khuzdar j ai pris un bus,un vieux Benz decore tout-partout de gligli metalliques et multicolores.Pendant la premiere moitie du voyage,route goudronnee.Mais j avais l impression d etre sur un de ces cheval de rodeo mecanique...pendant des heures!La seconde moitie, c etait carrement le mixer:de la piste au milieu du desert,et un nuage de poussiere permanent autour du bus qui s infiltre partout, sournoisement.
Puis direction Panjgur,au Sud-Ouest(pour vous imaginer,je descend de Quetta vers la cote en ziguzaguant...un coup au Sud-Est...un coup au Sud-Ouest.Un peu comme quand on a un vent de face en voile.)De nouveau des heures de bus-qui-transforme-en-bouilli dans le desert.Mais ca vaut la peine:Panjgur est un grand oasis qui vit presque en autarcie.Un fleuve,a sec bien sur,traverse la mer de palmiers dattiers.Le bazar est menu mais halucinnant.Un melange d Afrique et de Sri-Lanka,des marchands,souvent simplement assis a meme le sol des petites rues qui vendent tout dans des nuages de mouches,depuis des poissons qui ont aussi beaucoup voyage jusqu a n importe quelle piece de moto iranienne ou chinoise,en passant par diverses sortes de p'ann, une chique melangee de betel,tabac et plein d autres epices enroules dans une feuille verte coriace, dont les crachats rouge sang repeignent les murs.J ai goute et c est plus encombrant qu autre chose,pour a peu pres aucun effet.
A panjgur j etais mehman, i.e. hote,et c est une situation fort agreable,telle que je m en souvenais.J ai demande a mon hote si des etrangers venaient parfois.-"oui,il y avaient des Anglais avant"-"ah bon.quand ca avant?"-"Dans les annees... 1900."-"Je vois..."
L hospitalite est un point commun entre les Baloutches et les Kurdes,de meme que l identite aryenne(n.b.Dans cette region du monde on utilise courrament ce terme pour designer les peuples du groupe"iraniens",ou plus largement,indo-iraniens,et n a pas subi l impact de l usurpation de ce terme par l ideologie nazie.D ailleurs "Iran" et "Aryen" sont evidemment deux version du meme mot -une racine "aran",je pense)et un nationalisme modere mais profondement ancre.

De Panjgur,j ai pousse l exploration vers des lieux encore plus recules:Awaran,puis Mashkeh.De l avis des autochtones,j etais"le premier et le dernier" etranger qu ils voyaient,car le prochain devrait venir, au mieux, pour la generation suivante.

Pour atteindre ces bourgs,pas de bus,mais des pick-up toyota.A quinze personnes dans un vehicule pour Panjgur-Awaran,et meme dix-sept pour Awaran-Mashkeh.Sans compter les sacs de grains,les bidons d essence et tout les bagages.Ah je vous jure,il faut le vouloir pour aller la-bas.La piste qui travere de hautes chaines de montagne a un charme certain,et je m occcupe en admirant le paysage,seule occupation physiquement possible de toute facon.
Croise quelques Baloutches nomades.La famille type:Un dromadaire,trois ou quattre chevres trapues,le pere,la mere et cinq ou six enfants.

Awaran est disperse au milieu de chanps de ble et d oignon.C est que la poussiere extrement fine omnipresente au Baloutchistan,est de la poussiere de terre.Avec de l eau cela donne un sol fertil...seulement l eau est rare.
La-bas on a l electricite quelques heures par jours,et ces debiles(j entends,du gouvernement bien sur), au lieu d installer des eoliennes(une turbine produirait plus que la consommation de tout Awaran,selon les dires du responsable de la centrale electrique ou j ai dormis -pas d hotels la-bas,pensez-vous!),ont fait une centrale au diesel,avec le prix que c est pour l amener jusque la-bas(n.b.20 000 litres de fuel brule par mois!)et la pollution engendree.De toute facon elle tombe regulierement en panne.

Tout les villages alentours redoutent Mashkeh,car ce grand oasis est tiraille entre plusieurs chefs de tribus qui se font la gueguerre par milices interposees.Mais le coin est aussi repute pour sa luxuriance.Des centaines de varietes differentes de dattes poussent la-bas.
Pas d endroits ou dormir,et personne qui me croit lorsque je dis que je suis "touriste".Finalement je suis invite a dormir a la garnison de la police,situation un peu ambigue,puisqu il m a semble que c etait plus pour mieux controler mes faits et gestes que pour m aider.
Mais des le lendemain je rencontre des gens plus ouverts et fait le tour de quelques villages de l oasis.Au moment ou j annonce vouloir partir,certain me supplient presque de rester quelques jours encore.Le genre d endroit on l accueille aussi mal le depart que l arrivee!

Apres 15 heures de bus j arrive a Turbat.Il est quattre heure du matin et je suis litteralement ereinte.Le bus etais plein: parfois trois personnes par double siege,ainsi que des passagers sur le couloir,assis sur deux etages de bagages en tout genres,sacs de grains,nippes,fruits pourissants.Sur le toit aussi,pas un centimetre carre qui n ait ete occupe par des ballots,entre lesquels...d autres passagers encore.
Je dors un peu sur mon sac,allonge sur un etalage de bazar,en attendant que se leve le premier jour du printemps et que je puisse telephoner au contact qu on m a indique a Panjgur.Il fait chaud.

Turbat est sans interet,aussi le lendemain,c est-a-dire aujourd'hui,je prends un pick-up pour Gwadar et l Ocean.
On construit a pas d escargots une route entre Gwadar et Turbat.Les ingenieurs sont chinois mais les travaileurs Baloutches,et ca irait plus vite si c etait le contraire.Recemment trois de ces chinois ont ete assasine,ce qui doit etre considere comme une forme de sabotage ou l expression d un mecontentement, et depuis des dizaines de barbouzes sont postes sur les collines alentours et patrouillent mitraillette au poing,sur la piste et la route.Il y a aussi des check-point de police.A l un d eux,on m a fouille,compte mon cash,pris legerement a l ecart.Le gros flic degoulinant de sueur voulait voir mon garde du corps,une autorisation du gouvernement... J ai pas.Et je suis autorise (verbalement) a voyager dans la region par le gouvernement du Baloutchistan a Quetta.Que je lui dis.Je comprend rien a l anglais du chef,un de ses auxiliaires "traduis":"He wants a sweet"-"Pardon me?"-"He wants a sweet for his mouth."La je commence a flipper,a chercher comment leur echapper au cas ou... Mais c est juste de l argent qu il veut,un bakshish.L auxiliaire:"100 roupees"Le chef:"no,dollar!"
Qu ils sont maladroits! Je leur dis non tout court,haussant le ton(j ai bien compris qu ils essayaient de faire repartir le pick-up sans moi),et que si je leur donnais le moindre rond j enfreidrais la loi.Il ne trouvent rien a redire,ca doit etre la premiere fois qu on leur apprend la loi.Et me laissent repartir(ils m auront quand meme emmerde 10 bonnes minutes)et faire les deux ou trois cent kilometres qui restent jusqu a Gwadar.

A+
Bises iodees
Adrien

6 mars 2006

L'Asie,enfin?

Depuis hier a Quetta,Pakistan.
Je suis arrive hier apres-midi,au bout du troisieme jours de train.
Au total,56 heures..et quelques surprises. n.b.le bus prend une douzaine d heures.
Le train fait generalement du 20-30 kil/h,avec de rares pointes a 60.Un peu escargot,mais pratique pour ecrire,dormir,ou regarder par la fenetre:il y a peu de secousses.
A Zahedan,la police a voulu me coller aux talons une escorte armee jusqu a la gare ou jusqu a la frontiere.J y ai finalement echappe,en insisistant beaucoup.
Il n y avait qu un autre etranger a bord du train,un touriste allemand qui allait rejoindre sa copine etats-unienne a Islamabad.Pas mal de policiers,en civil ou en uniforme,et quelques passagers pashtouns ou baloutchs.
Une ou deux heures apres Zahedan,mirjave-Taftan,la frontiere.Passer avec mon visa perime n a pas ete facile.Les douaniers Iraniens sont parfois presque aussi pointilleux que les Suisses,et celui-ci voulait me faire retourner a Zahedan prolonger mon visa avant de revenir...mais dans ce cas,le voyage en train s arretait la.Il a fallu pas mal de diplomatie pour les faire plier.Finalement,en parlant au chef au telephone(c est bien la premiere fois qu en Iran je vois un probleme regle par telephone!),nous avons trouve un "compromis":Il m a fait promettre de ne plus remettre les pieds en Iran,ou alors avec un nouveau passeport,"otherwise i'll break your nose".
Il me fallut rester a l abris quelques minutes dans la piteuse douanne pakistanaise,a cause d une tornade de sable.En fait,ce desert n est majoritairement pas un desert de sable,plutot de roche et de caillasse,mais dans l air et sur le sol,il y a une poussiere tres fine qui s infiltre partout,et quand le vent tourbillone,c est pas la joie...

Le premier soir,nous passons la nuit (dans le train) devant la gare de Dalbandin,un petit fort anglais au milieu d un village baloutche tres isole.Il y des dunes de sable(du vrai,cette fois) qui se sont formees plus avant sur les rails.Les ouvriers,des patres baloutches,prennent la matinee et plus a deblayer la voie.J en profite pour aller faire un tour dans le village et voir a quoi ressemble un le Baloutchistan rural.On me met en garde:Non,il ne faut pas y aller,les gens sont mechants,etc... C est le jugement de l ignorance,et je l ai deja entendu tant de fois...
De fait,les locaux sont d une grande gentillesse.Ils n ont pas du voir d etranger depuis l independance, et pourtant,aucun curiosite deplacee,mais au contraire,une courtoisie un peu reservee.Le bazaar,c est la rue centrale(a peu pres la seule du village),bourree de maisons de the,d echoppes garnies,de camions sur-decores,et de pleins de gens (hommes uniquement, pas de femmes)comme surgis d un passe indetermine.On m offre le the.
Lorsqu on voyage comme je le fais,on devient sensible aux details,aux petites differences d une region a l autre. La facon de boire le the est une vrai revolution qui demande un temps d adaptation dans ces cas-la.Elle est,et c est remarquable,homogene au plan national(pas de differences a l interieur d un pays), mais change beaucoup de Turquie en Iran et d Iran au Pakistan.La Turquie est le premier pays, en venant d Europe, ou le the est si populaire,ou on ne coupe pas a au moins trois ou quattre verres par jour.Il se boit dans de fines soucoupes echancrees,et l on ajoute un ou deux carres de sucre que l on dissout et melange evec une petite cuillere.Pratique car facile a doser.En Iran,c est le choc:plus de tintement de cuillere,ni de petites doses:On sert le the avec une theiere pleine,et des morceaux de sucres irreguliers a cote.Il faut glisser un morceau dans la bouche et ensuite boire une gorgee.Un morceau de sucre peut ainsi servir pour plusieurs gorgees.
J avais fini par m y habituer,et meme apprecier.Mais avec le sous-continent cela change de nouveau.Ici,on ajoute du sucre et du lait avant meme que l eau bout.Pas le choix.Mais c est bon aussi.J aime deja.

Le deuxieme soir,on s arrete a nouveau pour la nuit:Un train de marchandise a ete touche par des tirs de roquette quelques dizaines de kilometres en avant:ca aurait du etre nous...merci au sable qui nous a retarde!C etait un train de marchandise,un soldat du train a ete blesse lorsque les rebelles ont commence a canarder au fusil-mitrailleur(z'avaient plus de munitions pour le bazooka?).

Le lendemain matin,en entrant dans le defile montagneux ou a eu lieu l attaque,les policiers sont un peu tendus,evidemment.Moi je me dis que les rebelles ont fait leur sabotage du mois,ou de la semaine,et qu on est probablement tranquille pour quelques jours.C est logique?
En tout les cas ils n ont pas recicidive pour l instant.J etais peut-etre statisticien dans une autre vie...

Entre l Iran et le Pakistan,il n y a pas que le the comme difference.C est un petit choc,le sous-continent s impose avec sa persuasion passive.Avec cette sorte de deliquecence,de debut de pourriture qui se trouve un peu dans chaque chose ici.
La poussiere(des tonnes),les enluminures des bus bondes,la puanteur sournoise du djou(egout a ciel ouvert,comme en Iran mais la-bas c est parfois des rivieres limpides,ici toujours des depotoirs), la nourriture trop epicee,et bien d autre chose rappelle avec une legere violence que l on est dans une autre region du monde.
J ai l impression que c est enfin l Asie.Enfin,parce que tant de fois j ai cru y etre arrive et tant de fois elle m a echappe des mains.
Sarajevo est une ville orientale en plein Occident, tandis qu Istanbul est plutot une vile d Europe en Asie.A sa maniere,Teheran allie les deux notions.La Turquie n est pas l Europe,definitivement.Mais j ai un peu dechante apres m etre cru "en Orient".Non, ca n y etait pas encore.Il y a bien eu des moments d Asie assez francs,a Urfa par exemple, mais il convient mieux d appeler ca "Moyen-Orient"
L Iran par certains aspects est encore plus europeen que la Turquie.L Iran est un cas a part.Un inclassable.L Iran c est l Iran,voila tout.
A Quetta,on sent de grandes vagues d Asie Centrale qui viennent d Afghanistan ou du "Pashtounistan" pakistanais.Asie Centrale,Sous-continent indien,j arrive a cerner ceux-la.Mais l Orient,l Asie?Ces termes sont-ils pertinents,en fin de compte?L Asie geographique est definie,et a peu de sens sur le terrain.
Peut-etre faut-il admettre que l Orient en tant que tel n existe pas , mais qu il est une idee,une image,un esprit rarement pure, rarement seul,qui opere avec plus ou moins de force sa magie dans cet hemisphere.

Salut a tous
Adrien

2 mars 2006

Un melange (d)etonnant

Salut a tous.

Aujourd'hui,dernier jour en Iran.J aurais des tonnes de choses a ecrire sur ce pays sans pareil.Sur ces gens,sur la politique,et surtout sur les paradoxes qui constituent l ossature de la societe iranienne.Mais je suis un peu las et je dois encore aller faire des provisions de vivres pour le voyage de demain...je vais donc essayer de faire court pour une fois ;)

Finalement ca n etait pas impossible d'"attendre" jusqu a maintenant.J ai rencontre une famille tres sympa qui m a invite a manger plusieurs fois cette cuisine iranienne qui me manque deja,et avec le fils d une vingtaine d annee,Yasser, je suis alle dans quelques coins sympas dans les environs de Kerman.
Je suis alle a Mahan,voir le mausolee d un ancien maitre derviche et un jardin du plus pur style perse au milieu de rien.Avec Yasser,son frere et un pote,nous sommes alle dans le verger familial a Joopar,profiter d une journee bucolique avec soupe et riz sur un feu qui ne voulait pas prendre,qalyun(nargile) et nan frais,du sangak en plus.Il y a de nombreuses sortes de nan en Iran,le lavash du petit-dejeuner qui seche tres vite et qui est un peu elastique,le taftun qui fleure bon la farine,le nun-e-rohani assez gras,et bien d autres encore,mais aucun n egal le sangak,le roi des nan,le prefere des enfants,cuit sur un lit de gravier.
Le dernir jour de mon sejour a Kerman je suis alle a Rayen,ou se trouve une citadelle qui etait en quelque sorte la petite soeur de Bam.L'Arg-e-Rayen(citadelle de Rayen) est cosie,pas encore trop restauree(En Iran,on a la facheuse manie de renover outrageusement les vestiges du passe...c est insupportable),et donne un idee du "style" de Bam,meme si elle est 4 ou 5 fois plus petite.
Bam,justement,fut ma destination suivante.L' argh-et-bam!, pardon,l'Arg-e-Bam, reste impressionante malgre la puissance du cataclysme.Des murs de trois metres d epaisseur ont ete instantanement reduis en poudre.Oui,sans rire,c est devenu une fine poudre,des grains de moins d un millimetre de diametre!!!Voila ce qui reste de l enceinte exterieure,un trainee de sable brun,conique,de quelques metres de hauteur.Mais des pans de murs subsistent ca et la,notamment sur le piton rocheux qui se trouve au centre de l Arg,maintenant lui aussi sous des tonnes de poussiere.
Il n en reste pas moins que j ai prefere Bam a Rayen,et que cette desolation post-catastrophique qui se degage des moignons de murs de la vieille ville a une certaine beaute tragique.Et me fait rever d un monde "post-touristique"...
Bam etait autrefois toute de brique et de terre,mais desormais,frappes par un traumatisme "des maisons de torchis",les habitants ont mis les anciennes techniques aux oubliettes et reconstruisent avec des centaines de litres de beton,de poutres metalliques,de finition a la peinture chimique,au plastic.Et ils le font avec une frenesie que je n ai vu egalee qu en Chine jusqu a present.Non,Bam ne sera jamais plus comme avant.ILs y a une part de l esprit de la ville qui s est definitivement envolee en decembre 2003.Reste la mer de palmiers dattiers.
J a passe mes trois nuits la-bas chez Akbar,un ancien prof d anglais qui tenait une guesthouse pour voyageur detruite,bien sur, lors du tremblement de terre.Mais il est de ceux que meme cela n abat pas et il a commence il y a dix jours la construction de sa nouvelle guesthouse,plus grande,avec,chose inhabituelle husqu'il y a deux ans,des fondations!!!Dix hommes y sont employes,a 8 euros...la journee.
Rien que pour sentir la resignation d Akbar et se marrer avec lui,il faut aller a Bam(Eh oui je fais de la pub,mais il en a besoin!)

Depuis hier je suis a Zahedan.C'a ete l horreur pour trouver une mosaferkhine qui m accepte,vu que je ne suis ni Iranien,ni Baloutche,ni Afghan.Et puis les hotels pas chers sont pleins toute l annee de trafiquants en tout genre.Zahedan est la capitale du traffic d opium en Iran,mais il n y a pas que ca,ici tout le monde a son petit traffic:de textile du Pakistan,de cigarettes,parfois meme de fruits et legumes!
La ville n est pas plus dangereuse que ca.L opium de toute facon est omnipresent en Iran.J ai vu des gens en consommer devant moi:dans de nombreuses familles,les hommes en fument regulierement a partir de 50 ans environ.Sous le shah,une loi autorisait meme sa consommation a partir de cet age-la!Et meme si la loi n existe plus depus belle lurette,ca n empeche pas les gens de continuer a faire comme si.Je repense a ce que m avais dit un Kurde de Dogubeyazit qui etait alle plusieurs fois en Iran:"La republique islamique, c est sur le papier,mais en realite...Du vent!" Mouais...je ne serais pas aussi categorique,mais c est vrai que beaucoup de foyers se distillent tranquilou leur tord-boyau,se fournissent l opium pour pepe,et les filles de familles riches de Teheran qui se font un mec different chaque jeudi ou vendredi soir...
J ai quelques fois parle avec ces grands-peres opiomanes.Aparemment l opium ca rend surtout ridicule.Ils me disaient qu ils se sentaient "hyper forts",apres,mais en fait ils etaient lents comme des moules anemiques,et pas bien vigoureux.Enfin,ils ont leurs raisons,une maladie douloureuse dont ils savent bien qu elle finira par les avoir, ou simplement une envie de passer leur retraite confits dans les reves du pavot... et cette odeur caracteristique de plastic brule!!

Le bazar de Zahedan est informe,totalement anarchique et vraiment cool!
J ai croise des Afghans a la barbe blanchie et ondulee(le pere noel n a qu a bien se tenir!),ou bien teinte en roux,des sunnites qui ressemblent a Oussama,et des je-ne-sais-d'ou tres impressionants:par exemple,barbe jusqu a la ceinture,grise,fourchue,sous des binocles du siecle passe...J en passe,et des meilleurs.
Bref ici c est une sorte de Baloutcho-irano-pakistano-afghanistan...un melange (d)etonnant.
Mange des brochettes de foie cuites a meme le sol,ce qui eclaire un peu la nuit,accroupi dans la rue entre d autres specimens.Les baloutchis ont l air assez blagueurs.Je passe incognito avec ma tete dans ce melting-pot(Ca fait moi aussi un petit moment que je ne me suis pas rase...),et c est bien marrant!Je dis que je suis turc,ou bien que mon pere est Iranien,ca vaut mieux par ici.

A plus a Quetta...

Khoda hafez

Adrien